Dragi Webdo n°474 : Alcool (HAS), syndromes coronaires aigus (reco us), aGLP1 versus sGLT2, FA et AVC hémorragique, dépistage des cancers, téléconsultations, Donjons & Dragons

Rédigé le 02/03/2025
Dr Agibus

Bonjour ! Pour commencer ce billet abordons la télémédecine avec une étude qui a comparé les soins reçus par des patients consommateurs "importants" de télémédecine versus les consommateurs "rares" de télémédecine. Les utilisateurs de télémédecine faisaient plus de consultations, et avaient moins d'examens "peu utiles" (bilans métaboliques, ECG de dépistage, imagerie pour lombalgie aiguë, PSA) mais on voit qu'ils avaient aussi moins de dépistage du CCR et moins de frottis, considérés comme de faible valeur par les auteurs... mais l'absence de prise en charge globale et de prévention semble donc encore mise en évidence dans cette étude qui n'étudie pas les soins utiles qui ne seraient pas réalisés en télémédecine par rapport à des consultations présentielles. Bonne lecture !

1/ Pharmacovigilance

Revenons encore une fois sur les analogues de GLP-1 et aGLP-1/GIP via un article du BMJ qui aborde les 22 décès dans les indications perte de poids et 60 décès dans l'indication diabète de type 2. Cela rappelle une fois encore qu'il faut évaluer la balance bénéfice-risque de ces traitements. Dans l'indication diabète de type 2, les bénéfices sur les évènements cardiovasculaires sont prouvés et ceux sur la mortalité probables, mais il est indispensable d'informer des risques d'acidocétose notamment en cas de jeûne.

2/ Cardiovasculaire

L'AHA/ACC, collège de cardiologie américain a publié des recommandations de prise en charge de syndromes coronaires aigus (SCA). Quand un SCA est suspecté, un ECG dans les 10min est recommandé, puis répété régulièrement avec un dosage de troponine (1 et 2h si Tropo HS ou 3 et 6h si troponine conventionnelle). 

  • Une dose de charge d'aspirine 162 à 325mg est recommandée dès le diagnostic posé (et d'autres inhibiteurs de P2Y12 aussi mais c'est dépendant de plusieurs facteurs que l'urgentiste gérera). 
  • L'antiagrégation est indiquée 12 mois après un SCA (aspirine + inhibiteur P2Y12) avec IPP si risque de saignement élevé. Si c'est du ticagrelor qui avait été introduit en inhibiteur de P2Y12, on peut poursuivre par une monothérapie par ticagrelor après 1-3 mois pour réduire le risque hémorragique. Si AOD pour FA, la double antiagrégation + AOD est à poursuivre pendant 1 mois, puis monothérapie par clopidogrel + AOD jusqu’à 1 an.
  • Les auteurs recommandent une statine forte dose (plutôt atorvastatine 40-80 cf ici) et si le LDL est toujours > 0,7gL, un autre agent (ezetimibe en 1er lieu) est à ajouter (grade 1), mais on peut l'ajouter aussi si > 0,55 (grade 2b). 
  • Contrairement aux recos européennes(ESC), les bêta-bloquants sont recommandés après un SCA. Un IEC/ARAII est recommandé en grade 1 si FEVG < 40%, diabète, HTA ou STEMI antérieur (ces 2 dernières critères ne sont pas dans les recos ESC) et, en grade 2a en l'absence de ces facteurs. Un épargneur potassique (surtout l'éplérénone) est recommandé (grade 1a) en présence d'un des facteurs cités ci dessus.
  • La colchicine à faible dose est proposée avec un grade IIb. Enfin, on n'oublie pas le vaccin grippe qui réduit la mortalité et les évènements cardiovasculaire (grade 1)


Voici un essai randomisé très intéressant du Lancet: chez  les patients avec une fibrillation auriculaire et un antécédent d'AVC hémorragique, faut-il anticoaguler ? Après un suivi moyen de 1,7 ans, un AVC ischémique est survenu chez 0,83% des patients anticoagulés par an, versus 8,6% chez les non anticoagulés (NNT=13). Cependant, une récidive d'hémorragie cérébrale est survenue chez 5% des patients anticoagultés par an versus 0,82% des non anticoagulés (NNH=24). Il y avait également plus de saignements sévères chez les anticoagulés (NNH=15 patients par an). Ainsi, le bénéfice clinique net prenant en compte les évènements ischémiques et hémorragies sévères est nul, et ne permet pas de privilégier une des 2 stratégies. Mais le principe "primum non nocere" peut aider à choisir.


3/ Addictologie

La HAS a publié un guide d'accompagnement à la prise en soins de la consommation d'alcool chez les femmes. Les femmes ont des risques plus importants que les hommes et la consommation sous-dépistée. Pendant la grossesse, il est important de déculpabiliser, d'accompagner de manière non stigmatisante, de prioriser le dialogue, de mesure l'importance des changements liés à période péri-natale favorisant les changements et la consommation d'alcool, et d'agir sur l'environnement. De façon générale, il y a des actions de réduction des risques aussi à mener en dehors de la grossesse : déconstruire les représentations, soutenir pour alléger la charge mentale des femmes au quotidien, informer et reconnaitre les liens entre violences et consommation d'alcool, et prendre en charge les éventuels psychotraumatismes. Pour tout cela, on peut utiliser des psychothérapies, des approches motivationnelles, s'appuyer sur les CSAPA, centres d'addictologie ou autre structure, ainsi que par les associations de patientes permettant un accompagnement par les pairs. Sur le plan du secret médical, la consommation d'alcool même sévère ne justifie pas d'une déclaration à la CRIP ou d'une mesure de protection, et les éléments recueillis en consultations doivent donc toujours être utilisés dans le respect du secret professionnel.

4/ Douleur

Une étude qualitative du BJGP Open s'est intéressée aux téléconsultations réalisées dans le cadre du suivi de patients atteints de fibromyalgie et de syndrome de fatigue chronique. Les patients ont manifesté un besoin de se sentir écouté bien que ce soit difficile en téléconsultation. Cependant, les patients ont également déclaré que la téléconsultation pouvait avoir des avantages, notamment lorsqu'ils étaient atteints de symptômes/douleurs invalidants . Enfin, il était également important d'avoir un suivi régulier et que la complexité de leur maladie soit reconnue.

5/ Oncologie

Le BEH a publié plusieurs études sur les dépistages organisés des cancers en France.

  • Concernant le cancer du col de l'utérus, 55% des femmes de 14 ans sont vaccinées avec au moins 1 dose et avec de grandes disparités régionales (pour mémoire la cible OMS est de 70% de couverture). La réalisation de FCU a augmenté, avec des couvertures entre 67% à 25-30 ans et 47% à 60-65 ans. 
  • Concernant le cancer du sein, la participation est de 50% environ au dépistage organisé et de 18% environ par des dépistages individuels, ce qui permet une couverture de 60% (il y a des femmes qui font DO+DI). Les auteurs rappellent en cas de DI sans DO, que le DO est plus performant grâce à la double lecture et d'une meilleure qualité des procédures.
  • Concernant le dépistage colo-rectal, le taux de dépistage est de 48% influant FIT et coloscopie. Parmi les dépistés, le taux de patients couvert par FIT était de 58% et celui par coloscopie de 42% (donc au total, seuls 1/4 des français réalisent leur FIT)


6/ Diabétologie

Cette revue systématique a comparé aGLP-1 et iSGLT-2 sur de nombreux critères de jugement selon le DFG des patients : (pour les catégories non présentées, iSGLT2 = aGLP1)

  • insuffisance cardiaque : iSGLT2 > aGLP1 si DFG < 90ml/min
  • néphropathie:  iSGLT2 > aGLP1 si DFG entre 60 et 90ml/min
  • évènements cardiovasculaires  : iSGLT2 = aGLP1, mais seuls aGLP1  > placebo si DFG > 90ml/min
  • mortalité cardiovasculaire: iSGLT2 = aGLP1 mais aGLP1> placebo si DFG >90ml/min et iSGLT2 > placebo si DFG < 60ml/min
  • mortalité toute cause:  aGLP1 > iSGLT2 si DFG > 90ml/min

7/ Le jeu du mois: Donjons & Dragons

Le manque de temps permet de moins en moins de jouer de nouveaux jeux à vous présenter, donc c'est peut être le dernier "jeu du mois". Donc abordons le jeu de rôle et notamment Donjons & Dragon (D&D). C'est donc un jeu dans lequel un "maitre du jeu" guide un groupe d'aventuriers dans des aventures médiévales fantastiques. Chacun interprète donc un personnage, plus ou moins héroïque, de la race de son choix (elfe, humain, nain...) avec des compétences de combat, de réflexion et éventuellement des sorts selon sa classe (paladin, magicien, barde, barbare...). Les actions sont réalisées selon des jets de D (souvent des dés à 20 faces, nommés D20), avec des scores de difficultés dépendant de la tâche à effectuer (convaincre, se battre, crocheter une porte etc...). Longtemps décrié, force est de constater que la littérature sur le "JDR" et donjon et dragons s'étoffe. Cet article trouve que D&D améliore les symptômes anxio-dépressifs et améliore l'estime de soi dans une étude avant-après mono-bras. Cette étude qualitative décrit comment D&D permet l'évasion, l'exploration de soi, l'expression créative, la création d'un soutien social et la mise en place de routines rassurantes. Même si ces articles publiés dans "Games for health journal" et "international journal of role playing" ont probablement un parti pris, par tous ces éléments, les JDR ont de nombreux points communs avec les TCC. Ils permettent de s’exposer de façon sécurisée à des niveaux de stress croissants, à la survenue d'évènements aléatoires, à la gestion des émotions, et après avoir surmonté les épreuves, d'améliorer l'estime de soi. Des études plus poussées sont en cours, notamment à l'université de Lausanne. Bref, jouez !

(Le maître du jeu se prépare...)

(Le groupe s'avance dans l'antre du roi des gobelins)

(Le druide se retrouve face à des rats-garous)

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@Dr_Agibus et @DrePetronille